L’article étudie le cas d’une entreprise familiale de cinquième génération dont la transmission d’une génération à une autre implique de multiples prédécesseurs et successeurs. Il utilise le cadre d’analyse proposé par Gersick, Lansberg, Desjardins et Dunn (1999), enrichi avec les concepts de socialisation et d’engagement. Partant du principe qu’on naît héritier, mais qu’on devient entrepreneur, l’objectif est donc de comprendre comment des héritiers deviennent entrepreneurs et reprennent les rênes d’une entreprise familiale. Un processus de fabrique d’entrepreneurs familiaux est mis au jour, qui permet, via une socialisation précoce, de générer de l’engagement et de faire émerger les entrepreneurs de la prochaine génération au sein du vivier d’héritiers. Une première partie présente le cadre théorique utilisé. Une deuxième partie présente et analyse la succession de la troisième à la quatrième génération, puis celle en cours de la quatrième à la cinquième génération. La complexité croissante de la famille, définie par le nombre de descendants et le nombre de branches familiales prenant partie à l’entreprise, va de pair avec une formalisation croissante de la transmission. Le processus de fabrique des entrepreneurs familiaux est un élément central de cette transmission. Il comprend trois étapes : incubation, mise à l’épreuve et sélection des héritiers. Il transforme le handicap que pourrait représenter la complexité d’une famille en avantage. Plus le vivier de repreneurs potentiels est important, meilleures sont les chances de voir l’un d’eux émerger et se transformer en entrepreneur familial.
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